Documentation d'actualités, Réglementation

Étude d’impact économique des usages orphelins

11 févr. 2014

Par analogie avec les maladies orphelines en médecine, on parle d’usage orphelin pour les cultures quand, généralement pour des raisons réglementaires, les producteurs ne peuvent pas assurer correctement la protection de leur culture face à des maladies ou des ravageurs. Les usages orphelins sont une préoccupation majeure des producteurs et de leurs organisations. Mais aussi des pouvoirs publics (voir  »
La commission des usages orphelins : un outil pour les filières agricoles françaises » sur le site du ministère de l’agriculture)

L’étude 2013 d’impact économique, réalisée par ForumPhyto, basée sur des cas concrets, consiste à faire un état des lieux des solutions phytosanitaires disponibles pour les producteurs, à évaluer leur efficacité et à quantifier les pertes dues aux manques de solutions efficaces.
Au niveau microéconomique, les pertes économiques s’échelonnent de 1 000 €/ha à plus de 30 000 €/ha pour certains cas.
Au niveau macro-économique, les montants en jeu peuvent être colossaux, de l’ordre de quelques millions d’€ par filière concernée.

Taupins en pommes de terre :

Les larves de taupins font des morsures superficielles ou creusent des galeries dans les tubercules, les rendant impropres à la consommation.
En 2012, année de forte attaque de taupins, la perte directe est de près de 10 millions d’€.

Drosophila Suzukii en cerises :

Drosophila Suzukii, a fait son apparition en Europe en 2009. Les fruits véreux, puis se liquéfiant, sont non commercialisables. En cerise, lorsqu’une parcelle est attaquée, elle devient non récoltable : quasi-impossibilité de trier à la cueillette et évolution très rapide de l’attaque. En 2011, une perte directe de 10 millions d’€ pour la filière cerise a été constatée. En 2013, la perte directe estimée est du double !

Désherbage de l’artichaut :

Ce problème devient aigu depuis l’interdiction du métobromuron en 2007. Le désherbage est particulièrement important en artichaut 1° année, le temps que les drageons fassent leurs racines. Le binage mécanique est coûteux. De plus, si la météo est défavorable, le binage doit être répété et s’avère peu efficace.
Si l’on ne prend en compte que les 4500 ha d’artichauts de 1° année en Bretagne, le surcoût direct lié au binage mécanique et manuel représente plus de 4.5 millions d’€ pour la filière.

Désherbage et désinfection des sols en mâche :

Depuis le retrait, là-aussi, du métobromuron en 2007, la situation est difficile. La situation s’aggrave maintenant nettement. De plus à partir du 1° janvier 2015, le métam-sodium, désinfectant du sol, voit sa dose homologuée divisée par 12 (de 1200 l/ha à 300l/ha tous les 3 ans). Or ce désinfectant contribuait de façon significative à la lutte contre les adventices.
Les plus gros problèmes sont d’ordre qualitatif : jaunissement de la mâche et présence de brins d’herbes. Il faut éviter la présence de plantes toxiques (séneçon, datura, morelle noire…). Or 1 mauvaise herbe au m² = 1 mauvaise herbe toutes les 7 barquettes de mâche !  
Si 20% des 5500 ha développés de la production française est désherbé manuellement, cela représente un coût de plus de 4 millions d’€. La situation est très nettement aggravée si on tient compte des cultures qui sont détruites. Ces situations seront la règle si aucune solution n’est rapidement trouvée. Pour la seule région nantaise, 2500 emplois sont en jeu.

Mouche du chou sur les choux à inflorescence (chou-fleur et brocoli) :

La mouche du chou attaque toutes les plantes de la famille des crucifères. Elle provoque des dégâts variés selon les cultures : galeries dans les parties consommables  (navet, radis), affaiblissement et perte de vigueur au moment de la plantation (chou-fleur, chou pommé), présence de larves dans la partie consommable (romanesco et brocoli).
Les dégâts en année difficile pourraient atteindre de l’ordre de 18 millions d’€ de dégâts, même si, en fait, selon les conditions météorologiques, les dégâts sont assez variables.
Il faut signaler de plus un problème important de distorsion de concurrence pour les producteurs de semences et de plants.

Aleurodes en cultures sous serres :

Les aleurodes affaiblissent les cultures, favorisent la croissance de fumagine sur les feuilles et les fruits, et réduisent la qualité des fruits. Ils peuvent aussi, en tant qu’insectes piqueurs/suceurs, être vecteurs de virus. Pour maitriser les populations d’aleurodes, les producteurs privilégient la protection biologique intégrée (PBI). Mais la protection phytosanitaire classique peut s’avérer nécessaire.
Pour l’ensemble de la filière, une perte directe moyenne à 3€/m² (hypothèse relativement basse) sur 50% des surfaces de serres (1200 ha en France), mène à un total de 18 millions d’€. Sans compter les dégâts et surcoûts plus difficilement chiffrables.

Dans chacun des cas concernés, les consommateurs subissent eux aussi des conséquences négatives : problèmes de qualité des produits, approvisionnement irrégulier des lieux de vente et/ou recours à des origines plus lointaines et pas toujours aussi fiables, augmentation des prix, problèmes de sécurité des aliments (par exemple mycotoxines).

Tous ces cas ne sont qu’une illustration de l’importance des dégâts que peuvent subir les cultures en l’absence d’une protection phytosanitaire appropriée. Notre souhait est qu’ils servent à mobiliser les professionnels, les firmes et les pouvoirs publics pour une résolution ferme et rapide de la question des usages orphelins.

Lire l’intégralité du résumé de l’étude 2013 d’impact économique des usages orphelins en fruits et légumes et pomme de terre.

Chacun de ces exemples fait l’objet d’un rapport spécifique détaillé.
Ces rapports par culture sont disponibles sur la partie membres du site ForumPhyto (identifiant et mot de passe requis) : « Étude d’impact économique des usages orphelins (2)« 

Si vous n’êtes pas membre et souhaitez avoir les études détaillées, n’hésitez pas à nous adresser votre demande (formulaire de contact en bas de la page ForumPhyto)

Pour aller plus loin : ForumPhyto avait déjà réalisé une étude d’impact économique en 2010 sur artichauts, radis et pommes.

Quelques exemples visuels des dégâts occasionnés par des maladies ou ravageurs non maîtrisés :

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