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Pesticides : Greenpeace tente (presque) vainement de faire peur

23 oct. 2015

1506AppleGreenpeace Ces dernières semaines Greenpeace (GP) a lancé deux opérations : Show devant des magasins Leclerc et rapport alarmiste sur les résidus de pesticides dans les pommes. Le succès n’est pas vraiment au rendez-vous. Analyse.

« Les pesticides, c’est offert » ?

GP a lancé une action coordonnée contre les grands magasins E Leclerc dans 16 villes de France.
Le but affiché : faire rentrer la chaine dans leur course aux zéro pesticide, vainement initiée en mai 2015.
Le mode opératoire : une dizaine de militants avec déguisements et banderoles donnent rendez-vous à la presse.

1510GreenpeaceLeclerc

Ce type d’opération « fonctionne » si la presse et surtout les réseaux sociaux s’enflamment. Mais cela n’a pas été vraiment le cas. Tout juste quelques reprises dans des médias locaux par exemple France Bleu, 20minutesToulouse, Normandie actu, Ouest France) et une petite reprise, éphémère, dans les réseaux sociaux : toujours le même scénario, où l’on voit bien que Greenpeace, c’est d’abord de la « com », sans mobilisation réelle.

« On a comme un pépin. » Avec les pesticides ou avec Greenpeace ?

GP a voulu une nouvelle fois jouer au marchand de peur en s’en prenant aux pommes dans l’Union Européenne, en publiant un communiqué de presse (intitulé « Pesticides : on a comme un pépin ») et un nouveau rapport : « Sur les 109 échantillons de pommes issues de l’agriculture conventionnelle, 91 contenaient au moins un résidu détectable. » GP admet que « les résidus retrouvés respectent les limites légales ». Mais, pour GP, « cela ne signifie pas qu’il faut nous en contenter. Bien au contraire ». Tout leur rapport consiste à lister les résidus trouvés et tout le mal qu’on peut en dire, et à tenter de fait de mettre en cause la réglementation.

La plupart des résidus sont trouvés à des niveaux tellement faibles qu’ils ne sont même pas quantifiables. En fait, comme récemment Générations Futures pour les salades (voir ici), GP ne s’appuie que sur la capacité des laboratoires à trouver des traces de plus en plus insignifiantes…

Le communiqué de presse de GP a été repris sans recul par quelques médias. Par exemple, L’Humanité, la RTBF, La Tribune de Genève. La nouvelle ne fait pas non plus le buzz sur les réseaux sociaux.

Il faut cependant garder à l’esprit que, cette fois-ci, un des objectifs de GP est d’arriver avec des biscuits et d’être un peu plus fort dans le symposium qu’ils co-organisent mi-novembre à Bruxelles avec PAN Europe[1], IBMA[2] et OILB[3]. Symposium pour lequel GP a refusé que Daniel Sauvaitre, président de l’ANPP et de WAPA[4] soit à la tribune (voir ici)…

La profession réagit publiquement

Le 22 octobre, sur AgriHebdo.ch, sous le titre « Ne pas céder à l’alarmisme: les pommes sont sûres et saines », Swisscofel, Association Suisse du commerce des fruits, des légumes et des pommes de terre, « rejette vivement les allégations de Greenpeace ». Swisscofel a estimé nécessaire de réagir parce que la reprise de la com de GP dans la presse suisse a été plus importante qu’ailleurs en Europe.

Extraits :
« Greenpeace suscite sciemment la peur et l’incertitude auprès des consommateurs avec son communiqué, tout en répandant des doutes sur les contrôles étatiques et privés et sur la sécurité des fruits. »
« Les personnes qui essaient de répandre la peur sont de mauvais conseillers. Les pommes de table sont sûres et saines pour les grands et les petits et pour les jeunes et les moins jeunes ».
« Des quantités infimes de produits phytosanitaires sont détectées dans près de la moitié de tous les échantillons. La raison en est claire: les procédés d’analyse et les laboratoires modernes trouvent aujourd’hui même les plus petites traces. Ce qui est décisif pour l’évaluation, c’est néanmoins la quantité de la substance active présente. »
« Même des dépassements sporadiques ne constituent donc pas un danger pour la santé; c’est d’ailleurs ce que soulignent régulièrement les autorités ainsi que p. ex. l’organisation faîtière des pédiatres allemands. »
« Jamais auparavant les produits phytosanitaires n’ont été utilisés aussi soigneusement et de façon aussi ciblée. […] Ils sont plus respectueux de l’environnement et sont utilisés plus économiquement. Les paysans sont sensibles à ce sujet aujourd’hui et sont surtout parfaitement formés. Un abandon total de la protection phytosanitaire comme l’exige Greenpeace est néanmoins impossible en Suisse, tant pour la production biologique que pour la production conventionnelle de pomme. »

En France l’ANPP a publié « Greenpeace démontre que les pommes françaises sont saines », un communiqué de presse plus succinct, mais tout aussi clair : « Comme toujours, Greenpeace choisit un ton alarmiste mais l’analyse des données publiées par l’ONG elle-même est rassurante !. « Aucun des résidus retrouvés dans les échantillons ne dépassait les limites maximales de résidus (LMR) fixées pour les pommes », reconnait l’ONG. La lecture du document est limpide : Dans tous les pays de l’UE, les pommes sont bonnes et saines. Et elles le sont particulièrement en France »
L’ANPP en profite pour renouveler l’invitation faite à Greenpeace (invitation restée sans réponse) de venir voir la mise en œuvre de la protection intégrée et du biocontrôle dans les « vergers écoresponsables ».

[1] Pesticide Action Network, association européenne dont Générations Futures est adhérente
[2] International Biocontrol Manufacturers Association
[3] Organisation Internationale de la Lutte Biologique
[4] Associations, respectivement française et mondiale, des producteurs de pommes et poires