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La bataille du glyphosate (suite) : Le CIRC en plein scandale ?

28 oct. 2016

Le CIRC[1], en classant en 2015 le glyphosate comme cancérigène probable, a alimenté les organisations environnementalistes et la machine médiatique. Malgré les avis rassurants de toutes les autres agences de sécurité dans le monde, cela a conduit l’Union Européenne à surseoir au renouvellement normal de l’autorisation européenne du glyphosate. Mais ces derniers mois, le CIRC accumule les casseroles qui remettent en cause sa crédibilité.

La presse anglo-saxonne soutient que le CIRC est empêtré dans des conflits d’intérêts avec les ONG écologistes anti-pesticides et qu’il a tout fait pour que le rapport scientifique de l’EPA[2],  soit enterré.
Voir l’article de Reuters, agence d’information, « le CIRC a fait pression sur les experts de l’EPA (Agence Officielle US) pour enterrer leur rapport sur le glyphosate (in English) »

Le Congrès demande des explications aux NIH[3] pour « leur soutien et l’engagement de leur personnel à une agence qui a été largement critiquée pour sa science décevante et infestée par des problèmes de biais » Voir l’article de The Hill, périodique parlementaire, « Les NIH doivent être transparents sur leurs dons de plusieurs millions à une agence non-fiable de l’ONU » (in English). Dans cet article, Bruce Chassy, ancien professeur universitaire de nutrition, « les problèmes [de conflits d’intérêt] du CIRC vont bien au-delà de Christopher Portier. Ils incluent une « porte tournante » de militants affiliés à des ONG et des « témoins experts » payés dans des procès anti-pesticides et anti-chimie »

Mise à jour du 28 octobre 2016 à 15H:
On peut toutefois relever que les accusations de « conflits d’intérêts » sont, d’une façon générale, avancées bien trop souvent à la légère. En l’occurrence surtout par le CIRC contre les agences sanitaires qui défendent le glyphosate. Leurs déboires aujourd’hui sont, en quelque sorte, un retour de bâton. C’est ce que relève Simplement / Simply Correct, dans un post Facebook, s’appuyant sur un article de JF Cliche dans Le Soleil (Canada).

Une nouvelle pierre vient s’ajouter dans le jardin du CIRC : 10 chercheurs en toxicologie viennent de publier « Les classifications basées sur le danger intrinsèque (et non pas l’analyse des risques, NDLR) sont dépassées, obsolètes, sont inadéquates pour gérer les risques liés aux substances chimiques et ne sont utiles ni à la science ni à la société » (in English), article scientifique paru dans la revue scientifique Regulatory Toxicology and Pharmacology.

Ils montrent que « des produits chimiques avec des différences de potentiel de risques de plusieurs ordres de grandeurs sont placés dans les mêmes catégories par des organisations comme le CIRC ou le système général harmonisé de classification et d’étiquetage des produits chimiques (SGH) des Nations-Unis. En se basant uniquement sur la notion de danger intrinsèque, on en vient à classer le fait de manger de la charcuterie dans la même catégorie que le gaz moutarde [gaz de combat].
Au contraire des approches basées sur le danger et la caractérisation du risque permettent d’avoir une vue intégrée et équilibrée du danger, de l’effet de la dose et de l’exposition. Cela permet de prendre des décisions éclairées de gestion des risques. »

Dit de façon plus brutale, la démarche du CIRC de classement des substances selon leur danger intrinsèque est à mettre à la poubelle. Seule compte l’analyse de risque prenant en compte le danger intrinsèque, l’effet de la dose et l’exposition.

Dans « Le CIRC est-il à la hauteur de la tâche ? » (in English), David Zaruk, The Risk Monger, liste l’ensemble des nombreux manquements du CIRC ces dernières années. Il suggère des pistes pour une réforme profonde du CIRC. Et conclut : « Le CIRC, tel qu’il existe aujourd’hui, est inutile. Il n’a pas d’intégrité scientifique. Il agit de manière non-éthique. Il n’est pas à la hauteur de la tâche. »
Le jugement est sans doute sévère. Mais il est probablement justifié.

Pour démêler en français les fils de cette histoire complexe, vous pouvez lire « Glyphosate, CIRC et EPA : ça barde aux USA » sur le blog de Seppi.

1610RiskMongerBYE

[1] Centre International de Recherche sur le Cancer (IARC in English) est une instance liée à l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé)

[2] Environment Protection Agency, Agence de l’environnement US.

[3] National Institutes of Health, organisations publiques de santé aux USA