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La bataille du Glyphosate (suite)

17 mai 2016

1503MoleculeGlyphosate Le Glyphosate continue de faire l’objet d’une bataille sans précédent. L’Union Européenne doit se prononcer le 19 mai. Les environnementalistes ont exercé une pression politique sans précédent ces derniers mois, amplifiée ces derniers jours contre le glyphosate. Mais l’OMS et la FAO viennent de publier un avis scientifique le disculpant. Point de la situation.

L’offensive environnementaliste

Depuis un an, les environnementalistes ont utilisé au maximum l’opportunité qui leur a été offerte par l’avis du CIRC de l’OMS[1], classant le glyphosate comme probablement cancérigène. Cet avis était pourtant entaché de plusieurs faiblesses :
– De forts soupçons de conflits d’intérêt non déclarés. En particulier Christophe Portier, un des  artisans actifs de cet avis, a omis de mentionner ses liens avec l’environnementalisme.
– Un classement non pertinent ? : Le CIRC classe également comme cancérigène probable le travail nocturne, la viande, etc. et comme cancérigène certain la charcuterie.
– Un classement uniquement basé sur le danger intrinsèque, sans tenir compte de l’exposition réelle.

Depuis, les environnementalistes ont continuellement exercé une pression sans précédent, non fondée scientifiquement, mais efficace médiatiquement et politiquement. Par exemple, ils ont  publié à plusieurs reprises des résultats d’analyse de bière d’une part et d’urine d’autre part, présentant des traces de glyphosate ; oubliant de préciser qu’il aurait fallu boire plus de 100 l de bière en une journée pour commencer à flirter avec le moindre risque ; oubliant également de préciser que la présence de traces dans l’urine ne fait que montrer une élimination efficace. Voir « Gott im Himmel! Bier in meinem Glyphosat… Hic ! C’est l’inverse » par Seppi.

Sans doute pour influencer la décision européenne qui doit se prendre le 18 ou 19 mai, les parlementaires européens verts se sont même prêtés à l’opération de manipulation médiatique.
Dans « Glyphosate (Roundup) dans l’urine des parlementaires européens : les disciples verts du bon Dr Goebbels », Seppi parle de « grossière escroquerie intellectuelle »  et ajoute : « Comment peut-on ignorer, à notre sens volontairement, que la dose journalière admissible (DJA) est de 0,3 milligramme par kilogramme de poids corporel. Pour une personne de 60 kg, une interrogation quant à la santé ne commence à se poser qu’avec l’ingestion – et l’excrétion – de 18 milligrammes de glyphosate par jour, 10.000 fois plus que la concentration moyenne mesurée. Comment peut-on, si ce n’est pour contribuer à une opération politique ? Hélas… »

Autre exemple de l’outrance de certaines ONG environnementalistes, des organisations liées à PAN Europe « portent plainte contre les responsables de l’évaluation du glyphosate en Europe », coupables selon eux de « déni des effets cancérogènes du glyphosate » (voir ici). S’appuyant sur l’avis du CIRC de l’OMS, ces environnementalistes visent essentiellement l’EFSA (agence Européenne de sécurité) et le BfR (Agence allemande qui a évalué le glyphosate en vue de sa réinscription éventuelle). En France, Générations Futures a annoncé le dépôt d’une plainte pour « mise en danger de la vie d’autrui et tromperie aggravée. » (voir ici sur Euractiv)

Les avis scientifiques

Toutes les agences de sécurité ayant eu à se prononcer sur la sécurité du glyphosate sont formelles : le glyphosate est un désherbant parmi les plus sûrs.

On connaissait l’avis du BfR (agence Allemande), sur lequel s’est appuyé l’EFSA (agence européenne). Voir ici. L’EFSA avait d’ailleurs répondu fermement aux attaques du CIRC (Voir ici). Son directeur executif avait d’ailleurs déclaré de façon peu protocolaire que, contrairement au CIRC, l’EFSA se refusait à « entrer dans l’âge Facebook de la science »

Récemment, l’avis de l’EPA (agence US de l’environnement), rendu public bien que non encore complètement officiel, mentionnait : « Le glyphosate est classé comme « probablement non cancérogène pour les humains » » (voir ici et ici, mais aussi ici (in English))

On a maintenant l’avis conjoint (in English) de la FAO et l’OMS (la maison-mère du CIRC en quelque sorte)  au sein du JMPR[2] rendu public le 16 mai 2016 : « Compte tenu de l’absence de potentiel cancérogène chez les rongeurs à des doses pertinentes pour l’Homme et de l’absence de génotoxicité par voie orale chez les mammifères, et en tenant compte des données épidémiologiques de l’exposition professionnelle, la Réunion a conclu que le glyphosate ne pose vraisemblablement pas de risque cancérogène pour l’Homme par l’exposition par l’alimentation. » Dans « Glyphosate prétendument cancérigène : le CIRC – canal militant – désavoué par sa maison-mère, l’OMS, et la FAO », Seppi entre dans le détail de l’avis et résume en conclusion : « En résumé, le classement du CIRC – quoique fort contestable car établi dans des conditions contestables, dans le cadre d’une manœuvre socio-politique – peut fort bien subsister : il y a des études qui « prouvent » qu’à des doses extravagantes… Mais après l’EFSA et l’EPA, la JMPR vient de désavouer la fraction militante, socio-politiquement engagée, du CIRC. À celui-ci d’en tirer les leçons. Quant à Bruxelles, on verra. Et pour la presse… il y a déjà une manifestation de dépit. »

Du côté des environnementalistes et de la presse qui les soutient, le dépit fait même maintenant place à la colère… Par exemple, pour Stéphane Foucart dans « Une nouvelle expertise minimise les effets du glyphosate » (Le Monde) (abonnés), « l’avis du JMPR a déclenché la colère des organisations non gouvernementales (ONG), qui reprochent au groupe d’experts des conflits d’intérêts. ». On ne pouvait pas s’attendre à moins. Pour les environnementalistes, il est inadmissible que l’avis du CIRC soit contesté.

D’autres médias rendent compte de la position du JMPR de façon plus neutre.
Par exemple le Nouvel Obs.

Les autorités européennes donneront-elles plus de poids à l’expertise scientifique du JMPR (FAO et OMS) qu’au sensationnalisme environnementaliste de ces derniers mois ? Il faut l’espérer.
Nous le saurons bientôt.

Cet article fait suite à plusieurs articles sur le sujet sur ForumPhyto, dont :
– « Glyphosate : le scandale du CIRC »
– « Sauver le Glyphosate : Mission impossible ? »
– « Haro sur le glyphosate ? »
– « Glyphosate : l’EFSA répond aux attaques »

[1] Centre International de Recherche sur le Cancer, agence de l’Organisation Mondiale de la Santé.

[2] Le JMPR (Joint Meeting on Pesticides Residues) est une instance scientifique d’évaluation des résidus de pesticides conjointe entre la FAO (Organisation pour l’agriculture et l’alimentation de l’ONU) et l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé)