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Etats Généraux de l’Alimentation : les agriculteurs doivent prendre la parole !

26 juil. 2017

Les Etats Généraux de l’Alimentation -EGA) suscitent d’âpres discussions. Ils sont l’émanation d’une volonté forte du chef de l’Etat, en réponse à la crise agricole, d’une « organisation [filière par filière] qui permette à chacun d’avoir un vrai partage de la valeur ajoutée ». L’intention est louable. Pour centrer le débat sur la création et le partage de la valeur, les agriculteurs doivent se mobiliser, en particulier en participant à la consultation publique.

Dans « Etats Généraux de l’Alimentation : un risque important de dérive », nous avions souligné le risque de voir « une alliance objective entre grande distribution et ONG environnementalistes : ils ont tous intérêt, financier et/ou idéologique, à détourner les EGA de leur objectif principal initial, économique, et à focaliser sur des objectifs présentés comme « sociétaux », foncièrement idéologiques et sans aucune base scientifique. » Les premiers jours des EGA montrent que cette logique est à l’œuvre.

Dans « Jusqu’à quand le Monde et Biocoop dénigreront-t-ils l’agriculture qui nous nourrit ? », Seppi montre comment Le Monde, par plusieurs articles, dont une tribune à Claude Gruffat, président de Biocoop, désigne l’abandon du « pacte faustien » de l’agriculture avec l’industrie chimique comme priorité absolue. Car, comme l’écrit Seppi, « bien sûr, l’ennemi, c’est la chimie. C’est devenu axiomatique ! ».
Le marketing agressif et dénigrant de Biocoop est donc bienvenu dans les colonnes du Monde, quotidien devenu essentiellement environnementaliste. Seppi souligne le profond mépris de C Gruffat pour les agriculteurs, accompagné d’une « litanie de contrevérités et de fadaises », en particulier « le modèle « conventionnel », affublé de qualificatifs péjoratifs, et le modèle « biologique », idéalisé ».
Michel-Edouard Leclerc n’est pas en reste. Il intervient sur France Culture (voir ici) ou, une fois encore dans Le Monde sous le titre « Michel-Edouard Leclerc : « Le monde agricole a intérêt à quitter un modèle trop productiviste » ». Tout ceci montre bien l’alliance assumée entre des médias devenus militants environnementalistes et la grande distribution.

La fondation Jean Jaurès, liée au Parti Socialiste, a publié « Les États généraux de l’alimentation : dernière chance avant liquidation », article principalement centré sur les questions économiques et le revenu des agriculteurs. Mais, par touches successives, l’article emboîte le pas aux environnementalistes. Il soutient que le « paradigme productif [est] désormais épuisé », que « la réputation environnementale de l’agriculture est mauvaise », ce qui reste globalement à démontrer (mauvaise auprès des ONG environnementalistes certes. Mais auprès du grand public ??). Mais ne se demande jamais si cette réputation est justifiée… Et donc, selon l’article, « la question environnementale sera évidemment prégnante ». Et il se félicite du poids de Nicolas Hulot dans le dispositif.

A propos de Nicola Hulot, il peut être utile de mentionner que ses conflits d’intérêts sont particulièrement importants. Conflits militants d’une part puisqu’il est directement issu d’une ONG. Sous couvert de participation citoyenne, il implique d’ailleurs quotidiennement les ONG dans le fonctionnement de son ministère… Conflits financiers d’autre part puisque sa fondation a des liens étroits avec de grandes entreprises dont les intérêts sont en lien direct avec l’activité de son ministère.
Sur ces sujets, on pourra utilement lire :
« Nicolas Hulot sera-t-il l’idiot utile de la grande distribution ? » (Agriculture et Environnement), et
« Nicolas Hulot et ses conflits d’intérêts : mais noooon ! », article de Seppi basé sur les révélations du Canard Enchaîné.

Notre conclusion

Notre conclusion s’appuiera sur celle de Seppi : « Les États Généraux de l’Alimentation – notez bien : l’agriculture est absente du titre – pourraient servir à une chose prioritaire, au-delà du partage équitable de la valeur produite : déconstruire le discours mortifère pour l’agriculture et les agriculteurs et, sinon imposer, du moins promouvoir le respect d’un code de bonne conduite. Que l’on cesse par exemple d’écrire, comme l’a fait M. Claude Henry dans l’article cité plus haut : « …l’agriculture industrielle sacrifie la santé d’êtres vivants et l’intégrité de la nature » ».
Bien sûr, l’agriculture, « les » agricultures, ne sont pas parfaites. Et les EGA sont une bonne occasion d’un débat constructif pour de meilleures pratiques et une meilleure alimentation, plus qualitative et plus sains et pour un meilleur respect de l’environnement. Mais le dénigrement insidieux de l’agriculture (« l’agriculture-bashing ») n’est pas admissible.

L’agriculture biologique est une activité honorable. Mais elle utilise aussi des pesticides, elle est aussi subventionnée (et même plus), elle a aussi des avantages et des inconvénients, etc. L’agriculture conventionnelle est une activité honorable : elle entretient les territoires, elle produit une alimentation saine et de qualité, elle progresse continuellement en matière de réduction d’impact environnemental.
Il faut arrêter d’opposer les systèmes. Tout n’est pas parfait et, oui, des améliorations sont possibles et souhaitables. Elles se feront si l’on respecte les agriculteurs et leur activité, si l’on arrête de « noircir » délibérément le tableau et si l’on parle de constats et de pistes réalistes.

Pour aller dans ce sens, il est souhaitable que les agriculteurs et le monde agricole prennent la parole et participent à la consultation publique, c’est ici. N’hésitez pas !

Mise à jour du 28 juillet 2017:
Nous recommandons chaudement la lecture de « États Généraux de l’Alimentation : petit tour de (morne) plaine« . Seppi y montre bien le décalage entre les objectifs initiaux déclarés, essentiellement économiques, et la pression exercée par les environnementalistes et la presse bien-pensante, complétement décalés par rapport à la réalité.
Nous partagerons en particulier cette interrogation : « le problème va se situer au niveau de l’exploitation des contributions. Que feront les décideurs pour les questions pour lesquelles on sait d’avance qu’il y a un biais de participation ? Pour les propositions déraisonnables, voire parfaitement stupides, mais attrayantes pour un public non informé, voire désinformé ? Entrera-t-on dans l’« Âge Internet de la décision politique » ? »

1707LabourEnBretagne